Le texte « Usage d’opioïdes et troubles liés à l’usage d’opioïdes » a été tiré et adapté de Primary Care Addiction Toolkit, en 2023. Publié en ligne seulement.
Ordonnances de méthadone
En mai 2018, Santé Canada a supprimé les exemptions fédérales pour permettre aux médecins de prescrire et de fournir de la méthadone à leurs patients. Malgré tout, les prescripteurs et les pharmaciens doivent encore se conformer à toutes les autres dispositions du Règlement sur les stupéfiants ainsi qu’aux exigences établies par leur province ou leur territoire ou par l’organisme de réglementation en matière de prescription sécuritaire.
Mode d’action de la méthadone
La méthadone est un agoniste oral synthétique pur des récepteurs opioïdes mu dont les effets s’apparentent à ceux de la morphine. Ses propriétés pharmacologiques uniques la rendent efficace pour le traitement du trouble lié à l’usage d’opioïdes. Elle a un délai d’action lent et une longue durée d’action, et elle ne provoque ni intoxication ni sédation.
Les patients qui prennent une dose quotidienne optimale de méthadone ressentent un soulagement de leurs symptômes de sevrage et de leurs envies impérieuses pendant 24 heures, et sont en mesure de fonctionner normalement sans sédation ni euphorie.
Innocuité de la méthadone
La méthadone a une demi-vie moyenne de 25 heures (plage de de 13 à 47 heures). Elle est facilement absorbée par l’intestin grêle, et des doses répétées mènent à son accumulation graduelle dans le sérum. Un état stationnaire peut être atteint après quatre ou cinq demi-vies, soit après environ trois à sept jours de traitement. Du point de vue clinique, cela signifie qu’une dose de méthadone plus ou moins adéquate le premier jour pourrait entraîner une surdose fatale le cinquième jour en raison d’une dépression respiratoire si la dose initiale est trop élevée. Des protocoles posologiques stricts aident les prescripteurs à reconnaître les patients qui sont davantage à risque d’une toxicité à la méthadone et qui pourraient profiter d’une dose d’induction plus faible.
Les doses plus élevées de méthadone pourraient être liées à un intervalle QT prolongé et à des arythmies comme dans le cas des torsades de pointe, qui peuvent s’avérer fatales. Il est recommandé d’effectuer un électrocardiogramme au départ, mais le manque d’accès à des tests ne devrait pas empêcher l’administration de méthadone. L’électrocardiogramme doit être répété si la dose de méthadone atteint les 120 mg, si le patient éprouve des symptômes cardiaques ou s’il présente des facteurs de risque préexistants (American Society of Addiction Medicine, 2020; Centre de toxicomanie et de santé mentale [CAMH], 2021).
La méthadone peut également causer des effets indésirables résultant d’interactions avec d’autres médicaments tels que les antibiotiques et les antidépresseurs, ou si elle est prise en concomitance avec d’autres médicaments qui sont réputés allonger l’intervalle QT (Bruneau et al., 2018).
La méthadone diminue le risque de surdose chez les patients qui font usage du fentanyl. L’atteinte sécuritaire et rapide d’une dose thérapeutique améliore l’observance. Les patients sous fentanyl pourraient avoir besoin d’une augmentation graduelle plus rapide de leur dose de méthadone et de doses thérapeutiques de 100 mg ou plus de méthadone en raison de leur tolérance accrue aux opioïdes (Bromley et al., 2021).
Candidats pour un traitement par méthadone
La méthadone pourrait constituer le traitement par agonistes opioïdes (TAO) le plus approprié pour les patients qui (CAMH, 2021; Initiative canadienne de recherche sur l’abus de substances, 2018) :
- préfèrent la méthadone plutôt que la buprénorphine-naloxone;
- répondent mal ou insuffisamment à la buprénorphine-naloxone;
- ont une très grande tolérance aux opioïdes. Des doses plus élevées de méthadone pourraient s’avérer plus efficaces que la buprénorphine au chapitre de l’observance chez les patients ayant une dépendance à des opioïdes illicites tels que le fentanyl (Bromley et al., 2021).